mardi 29 avril 2008

1er Mai , le grand matin


Dans deux jours, comme dans le reste du monde, c'est en Turquie aussi la fête du travail. Sauf que le jour n'est pas férié et que la manifestation prévue par les organisations de gauche a été interdite. Comme chaque année elle devait se dérouler à la place Taksim. Comme chaque année les militants vont venir en nombre et la police réprimera avec générosité. Encore plus que dans n'importe quel pays, le 1er mai est devenu ici le jour symbolique de toutes les luttes de la gauche depuis ce jour de mai 1977. C'est un fait caché de l'Histoire turque aussi bien dans l'histoire officielle du pays que dans les travaux étrangers pour le grand public. Donc, en ce jour du Premier mai 1977, 36 personnes (d'après Wikipedia) sont mortes. Au départ, des tireurs isolés (dont l'identité est toujours mystérieuse trente ans aprés) cachés sur les batiments alentours ont tiré sur la foule et ont voulu assassiner le leader du plus grand syndicat truc. Dans la vague de panique qui s'ensuit, de trés nombreuses autres personnes sont tuées par les forces de police, notamment écrasées par des véhicules. Depuis, chaque premier mai et notamment l'année dernière à l'occasion du 30ème anniversaire, les organisations de gauche (pas la parti kémaliste CHP bien entendu) viennent défier le pouvoir qui a toujours interdit les manifestations commémoratives à Taksim (les supporters de foot, les nationalistes, les policiers pour la fête de la police ont pourtant le droit de se regrouper sur cette place).

La vidéo ci-dessus montre des images d'archives intéressantes même si je n'ai pas compris le contenu des commentaires.

dimanche 27 avril 2008

Istanbul en chansons

Dans son édition du mois d'avril, le magazine culturel turc Roll a publié une liste de quinze chansons d'hier et d'aujourd'hui sur Istanbul en oubliant sciemment ou non (???) l'infâme "Istanbul c'est contantinople ... " pour lui préférer Istanbul'un kizlari (les filles d'Istanbul) du même Dario Moreno qui soit dit en passant était un juif originaire d'Izmir.
LES CHANSONS D'ISTANBUL
The breeders - Istanbul
Dario Moreno - Istanbul'un kizlari
Duman - Istanbul

Eartha Kitt - Uska dara Oh! Those Turks

Elbow - Hotel Istanbul
Emel Sayin - Kiz Sen Istanbul'un neresindensin

The four lads - Istanbul (Not Constantinople)[reprise de la chanson de Dario Moreno].

Grup Baran - Bekle Bizi Istanbul
La même chanson interprêtée par Edip Akbayram.

Kurtulus - Istanbul sokaklari

Marc Almond - She took my soul in istanbul

Mazhar Fuat Özkan - Bu sabah yagmur var Istanbul'da

Melike Demirdag - Istanbul'da olmak
Pamela - Istanbul

Sezen Aksu - Istanbul Istanbul Olali

Tom Waits - Telephone call from Istanbul

mercredi 23 avril 2008

Festival en contre-plongée


Le festival vient de se terminer, quinzes jours de folie cinématographique, 200 films, des dizaines de réalisateurs de tous les continents, des milliers de spéctateurs et ... C'est là que le bas blesse, et rien, retour à la normale : c'est-à-dire un gloubiboulga de blockbusters américains et de films populaires turcs. Il ne semble pas y avoir de place pour les autres cinémas le reste de l'année. Pourquoi ?
J'ai posé quelques questions à ce sujet à Nicolas Monceau (enseignant-chercheur à l'IEPG, ancien enseignant à l'Université Galatasaray et collaborateur du "Monde" enTurquie), spécialiste du cinéma turc.

_Comme vous l'aviez déjà constaté il y a dix ans, il existe réellement une dichotomie entre la programmation variée et pointue du festival et l'omniprésence des films américains commerciaux le reste de l'année. Cela est-il dû au système de distribution turc ?

Pour l’essentiel oui. Les grandes majors de distribution américaines – Warner Bros, UIP – se sont implantées en Turquie il y a une vingtaine d’années et elles distribuent de nombreux films hollywoodiens. Pour ces dernières, la Turquie est un marché important. On voit beaucoup plus de films hollywoodiens distribués en Turquie qu’en France par exemple. Cela s’explique aussi par les résultats du box office cinématographique en Turquie, où les « blockbusters » hollywoodiens dominent très largement.

_Depuis dix ans, la situation du cinéma turc a beaucoup changé, ce sont maintenant 60 à 70 films qui sont produits chaque année et qui rencontrent un public très large, comment analysez-vous cette embellie ?

On peut effectivement parler d’un renouveau du cinéma turc depuis une quinzaine d’années. Sur le plan artistique, cela se traduit par une reconnaissance plus importante de films d’auteurs turcs dans les grands festivals internationaux de cinéma, comme Cannes, Berlin ou Venise. Une nouvelle génération de cinéastes turcs a émergé depuis une quinzaine d’années, qui rencontre un succès sur le plan international. Parmi ces derniers, on peut citer Nuri Bilge Ceylan, et son film Uzak qui a remporté le Grand prix du Festival de Cannes en 2003, Zeki Demirkubuz ou encore Yesim Ustaoglu et Dervis Zaim. Parallèlement, le cinéma commercial et populaire s’est fortement professionnalisé. Les « blockbusters » turcs d’aujourd’hui, nettement plus maîtrisés sur le plan scénaristique et technique, peuvent rivaliser avec les blockbusters hollywoodiens. Un signe parmi d’autres : ils sont diffusés plus largement à l’étranger, comme le film VizonTele Tuba qui a même confiné au phénomène social en France. Ce regain de vigueur du cinéma populaire turc s’explique aussi par l’importance du star system qui s’est développé avec la télévision privée depuis le début des années 1990. Les grands succès populaires turcs, pour l’essentiel des comédies, attirent désormais le public avec des vedettes du petit écran, qui sont des comiques type one-man-show ou présentateurs d’émissions de divertissement. On peut penser à Dany Boon ou à Arthur en France. Par ailleurs, le cinéma commercial turc demeure toujours très populaire à la télévision, où une chaîne lui est même dédiée.

_Il n'existe pas réellement de salle de cinéma d'art et d'essai, mais existerait-t'il un public régulier pour ce type de cinéma ?

Il existe des salles de cinéma soutenues par le fonds Eurimages du Conseil de l’Europe, dont la Turquie est membre depuis 1990. Il y en a six en Turquie, dont cinq à Istanbul. Ce fonds soutient la production, mais aussi la distribution des films européens. Les salles qui bénéficient du soutien de ce fonds doivent programmer une part non négligeable de films turcs et européens d’auteurs. Par rapport aux entrées des films hollywoodiens au box-office turc, le public demeure en effet assez marginal. Certaines études montrent que le public du cinéma en Turquie est très majoritairement jeune.

_Pourtant, les billets pour le festival s'arrachent en peu de temps. Y-a-t'il un phénomène de distinction sociale et culturelle autour de la consommation d'évènements prestigieux comme le festival ou la biennale ?

Oui, le Festival international du film est l’un des grands « événements » culturels de l’année à Istanbul, et il attire un large public qui ne va pas forcément au cinéma en dehors. Parallèlement, c’est la seule manifestation d’envergure à Istanbul qui permette de voir des films étrangers de qualité, qui ont été présentés récemment dans les grands festivals de cinéma comme Cannes ou Venise, et des œuvres anciennes qui ne sont jamais diffusés en salles. Le Festival, lancé en 1982, a pris le relais de la Cinémathèque d’Istanbul, active de 1965 à 1980. Les mêmes personnes sont à l’origine de deux structures. La différence du Festival, c’est qu’il dure sur une période de quinze jours par an.


_Les films turcs d'auteur, tels ceux de Nuri Bilge Ceylan connaissant un certain succès dans les festivals et à l'étranger, cependant ils ne remplissent pas les salles turques, pourquoi ?

La fréquentation des films d’auteurs turcs est effectivement très faible par rapport aux films hollywoodiens en Turquie. Cela s’explique en partie par les pratiques culturelles du public turc, pour qui le cinéma relève avant tout d’un divertissement consommé sur le modèle américain. La cinéphilie, très présente dans les années 1960 avec des revues spécialisées du type Cahiers des cinéma, a quasiment disparu en Turquie. Par ailleurs, les billets de cinéma on un coût relativement élevé en Turquie par rapport au pouvoir d’achat du public. Enfin, les spectateurs savent que les films turcs seront diffusés à la télévision quelques mois seulement après leur sortie en salles.

mardi 22 avril 2008

Nouveau blog


Encore un nouveau blog ! Cette fois-ci ce n'est pas pour une question de censure mais d'opportunité. Il y a quelques semaines, un journaliste du nouveau site d'information en ligne Mediapart avait contacté notre professeur français à l'université de Galatasaray M. Bourse pour trouver des volontaires afin d'animer un blog sur la Turquie. Ce site expérimente un nouveau modèle pour internet, à savoir qu'il ne dispose pas de version papier et est payant, sauf l'accès aux blogs. Son créateur est l'ancien rédacteur en chef du Monde Edwy Plenel, qui s'est lancé le défi de faire vivre le journalisme indépendant sur internet. L'avenir nous dira si ce modèle peut être viable, espérons-le.
Quand à mon blog, sur ce site, je ne suis pas tout seul mais avec ma camarade Lola qui a elle aussi un blog perso. Je ne pense pas écrire des articles très différents pour ce blog mais peut-être que cela pourra rassembler un nombre plus important de lecteurs. Nous avons choisi l'appellation sobre de Nouvelles d'Istanbul pour ce nouveau blog. Bonne lecture

vendredi 18 avril 2008

Deux instantanés


DJ Mehdi est dans la place

Ce soir, le club Babylon qui se situe dans le quartier branché de Tünel, verra la venue d'un des plus talentueux représentants de la musique électronique française : DJ Mehdi. L'auteur de l'album Lucky Boy ( 2006, Ed banger Records / Because Music) succède à une longue liste d'artiste electro français qui ont posé ces derniers mois leur caisse de disques dans un club stambouliote. J'ai eu l'occasion ici d'assister à des sets de DJ qui ne seraient jamais passés dans mon coin de province reculée, ça doit être ça aussi la mondialisation culturelle. Heureusement, pas encore de soirées tecktonik dans les parages.

Bien que la liste ne soit pas exhaustive, ce sont presque tous les plus grands qui sont venus récemment ici. Les Daft Punk en personne avaient déposé leur pyramide l'été dernier à la Kuruçesme Arena pour un concert en plein air d'anthologie. Quelques mois plus tôt, c'était Birdy Nam Nam qui avait été invité par l'Institut Français. La liste est encore longue, depuis le début de l'année, ce sont Laurent Garnier, Vitalic, Vicariouss Bliss, Sebastian, Mr Oizo (cf. flat Eric) ainsi que Joakim qui ont fait escale au bord du Bosphore. A venir, Sébasiten Tellier, le représentant français à l'Eurovision (qui est un évènement phare en Turquie) le mois prochain au Chill Out Festival.

Tous ces concerts ont lieu dans deux salles très réputées d'Istanbul : Babylon (tous genres) et Indigo (seulement electro). Il est intéressant de constateur une très forte présence des artistes du label parisien Ed Bangers mené par Pedro Winter (aka Busy P). A quand la venue du duo prosélyte Justice ?

Ve 18 avril,

23 h @ http://www.babylon-ist.com/
Dj MEHDI
30 YTL, étudiants 20 YTL

mercredi 16 avril 2008

Drapeau : The bigger the better


C'est une nouvelle de la semaine dernière mais que je ne pouvais me passer de la publier. Je l'ai vu dans le très mauvais (en Turquie) quotidien gratuit 20 minutes. Dans le quartier de Gazi, le deuxième plus grand drapeau de la Turquie a été érigé devant le commissariat de police. Il fait 15 m par 22,5 soit 337,5 m2, le journaliste est précis. D'après l'article, il a été érigé sur un mat de 85m. Vous ne rêvez pas, ici on aime son drapeau ! Je n'ai pas vérifié mais je présume que le plus grand drapeau du monde dans le Guiness des records doit être turc.

vendredi 11 avril 2008

Street art à Istanbul

Au détour d'une ruelle, c'est à peine remarquable mais un Mickey brandissant une pancarte anarchiste se trouve là sur le mur, il s'agit d'un pochoir. Dans d'autres lieux la présence du street art est plus massive comme au café Urban à côté du lycée Galatasaray ou à Tünel. Dans presque tous les quartiers, il est possible de trouver des oeuvres artistiques murales ou d'autres interventions sur l'espace public qui appartiennent à ce que l'on appelle globalement le street art.


Le street art est aussi appelé post-graffiti, le graffiti étant des peintures à la bombe qui représentent souvent des lettrages, puisqu'il recourt à d'autres techniques comme le pochoir, les affiches, les stickers. Toute intervention dans l'espace urbain peut être considérée comme du street art, à condition qu'elle ne se fasse pas au profit d'un organisme privé, il s'agit alors d'une forme de guerilla marketing, par exemple les pochoirs annonçant l'arrivée du film Girdap pour le 21 mars.

Je ne participerai pas à cette guerre de clochers mais généralement le graffiti (qui appartient au mouvement hip-hop) n'est pas considéré comme appartenant au street art et les deux communautés artistiques cultivent leurs antagonismes.
A première vue, Istanbul n'est pas une ville où ces formes artistiques semblent développées, à la différence de Barcelone ou de Londres mais en flanant un peu dans la ville, une multitude d'oeuvres très variées s'offrent à l'oeil averti. Voici quelques clichés en attendant pourquoi pas, si le temps et l'envie sont toujours là, d'ouvrir un blog dédié au street art à Istanbul.


Pochoir, de Hrant Dink, journalite arménien turc assassiné voici plus d'un an par un ultra-nationaliste.



samedi 5 avril 2008

Ibrahim Tatlises, une voix en Or

Ibrahim Tatlises s'est peu à peu révélé à nous pendant notre voyage dans l'Est. Au départ, une vision subliminale. Une affiche dans la rue, une affiche pour son nouvel album "neden?" (pourquoi) tellement ringarde que l'on s'est bien demandé si ce n'était pas une pub pour des chemises.

Puis nous l'avons oublié, enfin pas sa moustache. Et lorsque nous sommes allés à Urfa nous apprenons que c'est là le fief de Voix Douce (traduction de Tatlises). C'est une sorte de dieu vivant, de nabab qui possède un véritable empire (compagnie de bus, chaîne de kébabs, compagnie aérienne, boîte de production entre autres). C'est un peu l'incarnation du self-made man version orientale: son père meurt très jeune, il commence à chanter dans les mariages. D'après sa bio wikipedia il serait d'origine kurde et arabe ce qui explique pourquoi on le voit portant le traditionnel keffieh kurde dans le clip suivant (dont il est aussi le réalisateur et où il fait semblant d'être un gars de la campagne). A 56 ans il a plus d'une trentaine d'album à son actif et reste plus que jamais la coqueluche des ménagères de plus de 50 ans avec sa moustache touch.

vendredi 4 avril 2008

Best of the EST # 3 - Symboles

A la vue de mes articles, tout le monde doit me prendre pour un obsédé des symboles nationaux, c'est vrai ! Voici un florilège de ce que j'ai trouvé dans mon voyage dans l'Est. Pour être franc, je n'ai pas rencontré là-bas une recrudescence particulière des manifestations de symboles nationalistes, la norme étant déjà assez élévée je dois l'avouer.

Les étudiants de l'Université d'Harran (Urfa) ont la joie de pouvoir pratiquer l'exercice physique sous l'oeil vigilant d'ATA, ici échauffement pour un match de basket-ball qui finira d'ailleurs en pugilat.

Place principale de Diyarbakir. Sur le bâtiment en face un petit chef d'oeuvre à la mémoire de Moustafa Kémal avec une citation et sur la gauche des symboles Hittites (si je ne me trompe pas). C'est une vue de ma chambre d'hôtel, par curiosité et pour tuer le temps, j'ai entrepris un petite enquête sociologique qui consistait à compter pendant une demi-heure le nombre d'hommes et de femmes qui traversaient la place. Résultat des courses : 75% d'hommes et 25% de femmes. La validité scientifique d'un tel chiffre est nulle mais généralement nous pouvons nous demander, à l'instar du chanteur Patrick Juvet , "Où sont les femmes" dans l'Est de la Turquie ? A la maison, sûrement.

En plein coeur de la zone à majorité kurde cette immense inscription sur la montagne en face du lac de Van vient rappeler à qui l'aurait oublié : "La patrie est indivisible", signé par le commando gendarme.
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